La Rabassotta Domata

Il avait franchi la montagne,
Parcouru à pied le chemin
Pour aller conquérir et le cœur et la main
De celle qui devait devenir sa compagne.
Il avait, c’est l’usage, emprunté des gants blancs,
Mis des souliers serrés et fait faire un costume
Pour venir, selon la coutume,
Faire sa demande en tremblant.

On lui proposa des châtaignes
Lui de peur de salir ses gants
Dit qu’il n’aimait pas ça ! Le jeune extravagant
En avait fait assez pour que l’amour s’éteigne…
En voulant trop bien faire, avec bonne intention,
Il sembla prétentieux à toute la famille ;
Plus encore à la jeune fille,
Il fit très mauvaise impression.

Il est donc rentré au village,
Elle est restée dans son hameau ;
Il n’avait su trouver l’attitude et les mots ;
Il n’avait pas affaire à une enfant volage…
Avec le froid, la neige aussi fit son retour.
La belle en descendant chargée, vers la rivière
Tomba, roula tête première,
Dispersant tout sur son parcours…

« À Andonn’ ils ont des fontaines !
Si Bernard revient, je dis oui ! »
Ce cri, allez savoir comment Bernard l’a ouï…
En tout cas il revint, de façon moins hautaine
Mangea de la châtaigne, humble autant que prudent ;
Si bien qu’ayant enfin su passer les barrières,
Nos deux amoureux se marièrent
Et eurent plein de descendants.

Légende familiale sur ma trisaïeule de Rabas ; noté du 18 au 24 thermidor 229 (5, 6, 7, 8, 9, 10 & 11 août MMXXI).


Confidentialité
   


Michel ASTRE, Poèmes et chansons pour les cinq saisons.